Duì (對)
Le temps est changeant le jour de mon départ d’Oulan-Bator. Une dépression annoncée devrait apporter avec elle les premiers flocons de l'hiver... nous somme mi-septembre! Déjà la température a chuté et le temps se couvre. Je traverse la ville dans un vent violent qui soulève la poussière. Les yeux me piquent, des grains de sable grincent sous mes dents et le goût de la terre s’immisce dans ma bouche. Aussi les sacs plastiques volent de toute part, emportés dans des contrées lointaines, mais qui ne dérogent rarement à l'impact de l'homme.
J'arrive à la gare un peu en avance pour avoir le temps de déposer mon vélo dans le wagon cargo. Je suis rejoins par Véra, une voyageuse allemande rencontrée à l'auberge et qui fera la route avec moi. Le train couchette n'est pas compartimenté comme souvent en Asie. Proximité garantie, mais il y a de la place pour les bagages, ce qui m'a permis d'économiser en emportant avec moi mes sacoches: le transport de marchandise est au poids.
Nous traversons la Mongolie en direction de la ville de Zaamin Uud, située au sud du pays. Rapidement nous nous retrouvons en pleine steppes, caractéristiques du paysage mongol. Mais la contemplation sera de courte durée, l'horizon étant rapidement englouti dans la pénombre de la nuit tombante. Nous voilà partis pour une nuit de sommeil au rythme des arrêts réguliers du train.
Nous arrivons au petit matin dans la ville frontalière. Après une nuit sous la pluie battante, c'est un vent violent qui nous accueille. Je ne regrette pas d'avoir opter pour les transports en commun dans cette partie. Je suis de toute façon un peu juste sur la durée de validité de mon visa chinois et ne pouvais me permettre de prolonger trop longtemps mon séjour en Mongolie.
Véra me devance pendant que j'attends de pouvoir récupérer ma bicyclette. Finalement nous nous perdrons de vue et je n'aurai pas l'occasion de la revoir. La particularité de cette frontière est qu'il est strictement interdit de la traverser à pied... ou à vélo. Le seul moyen possible est à bord d'un véhicule motorisé. Nous touchons ici le cœur de la stupidité humaine et de l’ineptie. Le transport est donc organisé par une ligne de taxi. Je charge mon vélo à bord du premier venu, n'étant même pas autorisé à remonter la file pour remplir les véhicules progressivement comme les autres piétons. Après plus d'une heure d'attente nous entrons dans la zone frontalière. Je dois décharger mon vélo pour passer le contrôle mongole... après n'avoir parcouru d'une centaine de mètres tout au plus!
Dans le hall c'est la cohue, plusieurs personnes se chargent de faire passer des produits plus ou moins légalement. Et à voir le nombre de tampons sur les passeports, il semblerait qu'ils en fassent leur activité principale.
Après avoir joué des coudes un moment et avoir fait attendre mon chauffeur, nous chargeons de nouveau le vélo pour nous rendre au poste chinois. Ici encore nous n'allons parcourir que quelques centaines de mètres!
Le coté chinois est déjà beaucoup plus calme. Cette fois c'est moi qui attend mon chauffeur, contrôle et désinfection du véhicule oblige. Nous chargeons de nouveau mon matériel pour une nouvelle centaine de mètres avant de sortir de la zone. Il m'aura fallu m'acquitter de pratiquement la même somme que pour avoir parcouru la moitié du pays du nord au sud en train. Tout ça pour une règle directive prise par un illuminé. Mon chauffeur m'amène cependant jusque la ville où il se rend pour récupérer d'autres passagers.
Je prends ici un bus pour Pékin. J'avais prévu de me faire déposer un peu avant la capitale pour finir à vélo et faire un crochet par la muraille de Chine. Cela s'avère un peu compliqué et surtout me ferait me voir débarquer en plein au milieu de la nuit et au milieu de nul part. Je décide donc de rester dans le bus car le chauffeur autorise les passagers à finir la nuit dans la couchette du bus.
Je pars pour le centre ville aux premières lueurs du jour. Pékin s'éveille tranquillement. La lumière est douce et le ciel est clair. Peu de pollution ces jours ci, poussée par le vent fort présent ici aussi. Je déambule en direction du centre ville appréciant le calme des rues presque vides.
J'atteins le centre ville et rejoins une auberge où je retrouve Xavier et un ami à lui. J'ai rencontré Xavier huit mois plus tôt en Iran, lui est en mode sac à dos. Le hasard fait qu'après avoir parcouru des chemins différents (il a opté pour le sud, le Népal, la Birmanie...) nous nous retrouvons à Pékin. Nous entamons les visites avec la cité interdite et la place Tian an Menh.
Le lendemain je me mets à la recherche d'hôtes sur la capitale. Les auberges sont relativement assez chères et je n'avais pas prévu mon arrivée anticipée. Heureusement Peyman m'accueille dès le jour même. Pékinois d'origine, il a étudié quatre ans en Iran... décidément!! Il a choisi un surnom provenant de ce pays qu'il a tant aimé. La plupart des chinois optent pour un surnom à la mode occidental afin de favoriser les échanges et la compréhension, leur nom étant bien souvent imprononçable pour nous étranger. Je ne compte pas les Jack, Lucy et autre que j'ai pu rencontrer.
Je dois pour le retrouver traverser une bonne partie de la capitale. Heureusement pratiquement toutes les rues sont pourvues d'un espace réservé aux deux roues. Rouler devient rapidement un jeu dans cette cohue. Je prends rapidement de la vitesse dépassant la plupart des vélos. Mais comme dans l'océan, il y a toujours un poisson plus gros, et ici l'espace est partagé avec les scooters presque uniquement électriques. Si c'est une véritable aubaine pour les oreilles, le problème est qu'on ne les entend pas venir. A la mi parcours je me fais dépasser d'un peu trop près, le chauffeur ayant probablement mal anticipé l'encombrement de mes sacoches. Il me bouscule et dans mon élan je percute la plate bande centrale. Ma roue se bloque dans la barrière, je fais un vol plané par dessus et roule sur plusieurs mètres sur la voie des voitures. Heureusement aucun véhicule à ce moment. Le temps de retrouver mes esprits le scooter a naturellement disparu. Aucun dégât corporel par chance, mais mon porte bagage avant est hors d'usage. Brisé en trois morceaux, les points de fixations ont eux aussi pas survécus au choc. Il est irréparable. Je fini donc avec les sacoches accrochées au guidon, à vitesse réduite.
Je profite du dimanche pour faire un tour dans un parc avec Peyman puis au temple du ciel où je retrouve Xavier. Le temple majestueux bâti en honneur à l'empereur, qui faisait le lien entre les esprits et les humains. Nous sommes rejoins par d'autres français, expatriés à Pékin, que Xavier connait... d'amis d'amis... Un truc du genre est désormais classique en voyage.
Camille nous invite à une virée de groupe qu'elle organise à la grande muraille de Chine. Cette merveille du monde ne s'est imposée dans mon programme que tardivement. Un peu honteux, je découvre ce paysage que nos amis nous font découvrir gratuitement par leur connaissance du lieu très peu touristique. Nous assistons au couché de soleil à l'heure de l'apéro... et oui on est français !
Je passe deux jours à tenter de réparer mon vélo, sans succès. Malheureusement je peine à me faire comprendre et rouler de toute part dans pékin est vite frustrant et décourageant. Si quelques échoppes m'ont ouvert la porte chaleureusement, l'accueil s'est montré beaucoup plus froid une fois assimilé qu'ils ne pouvaient rien pour moi. La solution qui s'impose est de bricoler en attendant de pouvoir le réparer plus sérieusement.Je fini par attacher mes sacoches directement sur ma fourche.

Je change d’hôte, Josh cette fois, qui m'accueille dans son appartement situé au vingt neuvième étage près du quartier des affaires. Vue garantie. Je profite de mon temps libre pour me mettre à jour sur différents réseaux sociaux comme je peux. Il faut savoir que les principaux réseaux sociaux tels que Facebook, Instagram, Whatapps... sont prohibés en Chine. Tout est condensé dans un seul et unique, l'incontournable Wechat. Avec celui-ci tout est possible (et surtout contrôlable). Les achats s'opèrent via cette application, même pour prendre le métro ou pour acheter quelques fruits au marché, générant une dépendance au smartphone et une hantise de la batterie vide.
Le vendredi je rencontre l'équipe kiné d'une clinique pékinoise avec qui j'avais pris rendez vous quelques semaines auparavant. L'équipe est très hétéroclite concernant les origines de ses membres. Sheilagh, chef de service est écossaise, Stéphanie et Raphaël sont français, Udi est indonésienne, Jako est sud-africain. Même si leur pratique est exclusivement occidentale, tout comme leur patientèle, cela me permet d'avoir une première approche du métier en Chine. En effet le statut de kinésithérapeute n'est officiellement pas reconnu dans le pays et la plupart des thérapeutes étrangers doivent s'arranger avec les directives pour pouvoir pratiquer ici. Ceci explique aussi pourquoi mes recherches sont difficiles et peu fructueuses.

Je profite de mes dernières journée pour clôturer les visites des incontournables de la ville de Pékin. Je me rends au fameux palais d'été construit par l'impératrice Cixi au cours du XXème siècle, et situé en périphérie de la ville. Alors que je regarde la carte (enfin mon GPS) pour repérer l'entrée, je suis abordé par Maya, israélienne. Elle aussi cherche l'entrée et nous décidons de poursuivre la visite ensemble. On me demande souvent si ce n'est pas trop dur d'être seul en voyage... force est de constater que je ne suis que rarement seul. Les voyageurs solitaires attire la curiosité des locaux, et la sociabilité d'autres voyageurs. Ainsi des rencontres éphémères le temps d'un visite, d'un repas, est monnaie courante dans mon périple.
Je dépose mon vélo à la gare après avoir traversé une nouvelle fois la capitale. Je ne pourrais globalement pas me plaindre de la circulation en Chine, même dans les agglomérations (si ce n'est des scooters).
Je peine à trouver l'entrée, exclusivement piétonne, les officiers plus disposés à prendre des photos que de m'aider. Je récupère mon billet de train au guichet et tente de me renseigner pour savoir où déposer mon vélo. L'employée me rétorque qu'elle n'est là que pour vendre des billets et qu'elle ne dispose donc d'aucune information sur le transport de fret. Au bureau d'information c'est la même réponse... un comble! Je trouve finalement une bonne âme qui m'explique que cela se trouve dans une branche différente qu'il me faut rejoindre à vélo. Le contrôle de mon vélo est beaucoup plus sommaire que dans le Xinjiang, et je peux laisser essence, couteaux... ce qui n'est pas commun dans le pays, la plupart des cyclotouristes devant jouer de ruses pour conserver leur précieuse lame.
Je retrouve ensuite Benjamin. Ami d'ami, j'ai déjà eu l'occasion de le rencontrer à plusieurs reprises. Ben est expatrié en Chine depuis plusieurs années où il travaille dans l'importation du vin, français naturellement. Avec sa copine ils m'invitent à déguster un canard laqué, incontournable à Pékin. Le tout accompagné d'un coup de rouge de son importation! Puis nous partons à la découverte de la nightlife de la capitale avant que je ne me dirige vers le sud du pays le lendemain matin.

Mon budget ne me permettant pas d'opter pour le train à grande vitesse, j'ai donc opté pour le train interrégional. Celui qui s’arrête dans toutes les villes. J'ai donc décidé de profiter du samedi soir comme il se doit afin de rejoindre la gare directement après la sortie de la boite de nuit, mon train partant relativement tôt (8h) le matin. Ainsi je peux profiter de dormir le plus possible pour ce trajet qui s'annonce légèrement long: 28h au total, sans changement. Malheureusement Il ne me sera pas si aisé de fermer l’œil, les chinois ne sont pas des plus discrets. Je passe donc le temps entre lecture et visionnage de film, entrecoupés quand même de sieste généreuse.
De l'eau chaude est à disposition dans le train. Ce qui me permet de faire du thé et des nouilles instantanées au moment du déjeuner, celles-là même que je m'étais juré de ne pas toucher. Les couchettes ne sont encore une fois pas cloisonnées et je ne passe pas aperçu dans le wagon. La nouvelle se répand vite et chacun passe me dire bonjour. On me met rapidement une bière dans les mains. Difficile de refuser auprès de mes nouveaux compagnons locaux. Au moment du dîner j'ai droit au Baijiu, l'alcool de riz. Ces gens là n'ont donc visiblement aucun respect pour ma gueule de bois Finalement le trajet passe plus vite qu'attendu. Nous sommes débarqués à Guilin le lendemain vers midi. Le temps de récupérer mon vélo et d'y fixer mes sacoches directement à la fourche de mon vélo grâce à des chambres à air de vélo.
Ici c'est Ryan qui m'accueille. Originaire de la ville, il revient d'avoir étudié à Macao puis travaillé à Singapour. Guilin est une ville de taille moyenne avec environ un million d'habitants. Enclavée entre les concrétions calcaire, la ville ménage son expansion avec les aléas du relief. Nous profitons des belles heures pour profiter des points de vue. Je fais ainsi (re)découvrir sa ville natale à Ryan, plus disposé à passer ses journées sur les jeux vidéos.
Il est ensuite temps pour moi de reprendre la route. Je sors de Guilin avec une facilité déconcertante. Je trouve rapidement une piste cyclable qui serpente à travers la forêt.
Je poursuis donc à l'attaque des montagnes calcaires des alentours de la ville. Nous sommes en pleine vacances chinoises pour la fête nationale et tous les sites touristiques sont hautement fréquentés. Heureusement la masse se concentre bien souvent dans des lieux stratégiques. Je peux donc évoluer tranquillement dans cet univers majestueux sans encombres. Toute la magie de la lenteur du vélo prend son sens dans cet amoncellement de petites montagnes entre lesquels je me fraye un chemin.
J'atteins Xingping, rendez-vous touristique avec son embarcadère pour une croisière sur la rivière Li. Ici, difficile de progresser avec mon vélo tant la foule est massive. Je réussi à voler une photo au fameux "20 Yuan bill viewpoint" (point de vue "billet 20 Yuan") écrit tel quel sur mon GPS. Le paysage a bien changé, le pécheur solitaire remplacé par des centaines de bateaux de croisière, plus rentables.

Après avoir parcouru moins d'un kilomètre, je suis de nouveau presque seul sur la route. Les chinois ont la particularité de généralement se masser aux endroits touristiques, sans chercher à s'en éloigner. On m'a rapporter le même phénomène sur la muraille de chine, où après avoir joué des coudes sur un demi kilomètre, il est tout à fait possible de prendre des photos seul sur la muraille.
Je campe près de la rivière, rapidement rejoins par un jeune enfant. Nous avons une discussion passionnante pendant près d'une heure. Enfin surtout lui car il est particulièrement loquace, et moi de répondre par un des seul mot que je connais: "Duì!" qui dans le contexte peut se traduire par: ""tout à fait". A ce jour je ne peux toujours pas affirmer qu'il ait vraiment saisi que nous parlions pas la même langue.
Je traverse la rivière grâce à un bac. Je me faufile pour atteindre le pied de la montagne Xiang gong. Une petite ascension me permet d'arriver à l'un des points de vue incontournable de la région, et pour cause!

J'arrive ensuite à Yangshuo. J'ai contacté Sam via le réseaux Couchsurfing et il m'a proposé de m'accueillir. Mais l'adresse qu'il m'a transmise s’avère être un hôtel. Je suis un peu rebuté car certaines personnes utilisent le réseaux à des fins commerciales. Même si les prix proposés sont avantageux, cela ne correspond pas à l'esprit du site internet. Mais non! Sam n'a pas de chambre à me proposer gratuitement car toutes sont occupées en cette période touristique. Mais il me propose d'installer mon campement sur le toit de l’hôtel où je peux jouir d'une vue sur la ville et d'une tranquillité à toute épreuve.

Je rencontre ici un couple d'américains avec lequel je sympathise. Nous organisons une journée escalade, la région étant un haut lieu pour la pratique de la varappe. Il est bon de retrouver la sensation sur le caillou dans ce décors atypique. Si j'ai l'habitude de marcher à travers champs et forêts, c'est la première fois que je dois traverser des rizières pour me rendre à notre lieu de pratique. Le paysage est magnifique et Sam s'avère être un grimpeur expérimenté avec lequel je peux profiter de faire quelques longueurs.

Je prolonge mon séjour d'une nuit supplémentaire (comme souvent en fait!). Passionné de sport, Sam a tout l'attirail pour ouvrir un cabinet de kiné. Ayant eu des soucis au genou nous discutons donc d'un programme de rééducation adapté.
Après des adieux matinaux je reprends la route toujours en direction du sud de la chine.

Je sors de la ville et parcours la campagne. La circulation sur la route est abondante ce qui n'aide pas mon avancée. Mais le paysage est vraiment sympathique. Les mamelons calcaires s'espacent et laissent place aux cultures. Je m’arrête pour déjeuner le long de la route. Mon vélo est appuyé contre un arbre, les sacoches ouvertes pour récupérer les diverses denrées et matériel.
Comme toujours dans ces cas-là, la scène se passe au ralenti. Je n'ai pas positionné mon vélo de façon assez stable. Je le vois lentement osciller jusqu'à basculer du coté opposé. La pente qu'il surplombe aide à lui faire prendre de l'inertie et voilà qu'il bascule littéralement faisant un tour sur lui même et termine sa course trois mètres plus bas... Dans un canal! Heureusement peu profond, ma bicyclette reste donc en surface, immobile après sa folle dégringolade. Mais les sacoches ouvertes ont déversé dans l'eau boueuse tout ce qu'elles contenaient... passeport, appareil photo, téléphone, argent liquide, j'en passe et des meilleures. Me voila les pieds dans l'eau à essayer de sauver ce qui peut l’être et donner les premiers secours à ce qui ne l'a pas pu. Matériel informatique démonté, billets étalés, passeport ouvert... Le spectacle est de taille proportionnel à mon désarrois. Je contemple le désastre de mes affaires qui sèchent lentement.

Après deux heures de séchage je me remets en route, laissant l'avenir me dire ce qu'il adviendra de mes affaires. Contre toute attente l'appareil photo a plutôt bien survécu à son expédition sous marine. Les billets aussi, le passeport n'a pas été altéré même si son apparence a fortement été dégradé. Au final, seul l'ordinateur n'a pas survécu et c'est pourquoi j'ai pris un certain retard dans la mise à jour de mon blog. J'ai pu récupéré toutes les données (photos, documents...) qui étaient dessus, une chance dans mon malheur.
Je poursuis donc ma route jusqu'à trouver un endroit où camper près d'une rivière. Le lendemain je roule jusque atteindre la ville de Liuzhou, où c'est John qui m’accueille. Travaillant tard, je dois l'attendre en ville où je reporte ma frustration de ma mésaventure sur quelques pâtisseries. On fait ce qu'on peut dans ces cas-là...! Liuzhou est une ville relativement moderne où il n'y a pas grand chose à visiter. Son seul attrait pourrait être son coté nocturne, où tous les bâtiments sont intensément illuminés donnant à la ville un coté féerique au grand damne de mère nature. Je vous joins une photo internet, mon appareil photo étant à ce moment temporairement hors d'usage.

Mon séjour en Chine ne m'aura pas vraiment rendu très optimiste sur le respect de l'environnement. La prise de conscience minimale que nous avons acquis dans notre société s'avère totalement inexistante dans ce pays. On jette allègrement ses déchets plastique dans la rue ou par la fenêtre de la voiture, l'économie d'eau est souvent inexistante, les lumières sont omniprésentes. L'idée de généraliser le peu que j'ai vu à 1,4 milliards d'habitants laisse dubitatif quand à l'avenir de notre belle planète. Et malheureusement c'est ainsi dans la plupart des pays que j'ai visité.
John me propose un appartement secondaire tout à moi. Il vit encore chez ses parents en attendant que cet appartement soit totalement aménagé où il pourra s'installer avec sa copine. Passionné de voyage, désespéré du comportement global des chinois (j'ai pas aborder la manie de cracher, partout et ostensiblement, de parler bruyamment, de bousculer...). Nous avons donc quelques sujet de conversation en commun mais nous n'aurons malheureusement que peu de temps. Il fait parti de ces rencontres qui semblent trop brève dans mon voyage. Je reprends la route après que sa maman m'ait apporté un petit déjeuner complet.

Après quelques kilomètres je suis attiré par le son mélodieux d'un Erhu, instrument à corde chinois. Un homme est là, sous un échangeur, à jouer de ce magnifique instrument. Je m'arrête donc pour profiter de la mélodie. Il semble jouer pour lui même sans mendier, les quelques passants étant totalement indifférents à sa musique. Et pourtant, le temps est pour moi comme suspendu alors que je profite de cet instant magique. Je le remercie chaleureusement avant de reprendre la route.
Rapidement le temps se couvre. J'avale une soupe de nouille pour déjeuner et je patiente qu'une averse diluvienne daigne passer son chemin. Après quelques kilomètres un "Hello" me surprend et me sort de mes pensées. A mon air pantois mon interlocuteur demande "Do you speak english?"Il faut dire que dans ce pays il est plutôt recommandé de poser cette question.
Ils sont deux cyclistes, deux anglais, juste à coté de moi.

Vélo neuf et peu chargé, je sais d'office qu'ils ne sont pas sur le long court. James à rejoint Ollie dans son trip de quelques semaines en Chine. Il se dirigent vers Kunming avant de reprendre vers le nord. Quelle joie de trouver ici des compagnons de route. Nous roulons ensemble alors qu'ils s'adaptent gentiment à mon allure.
Le temps toujours maussade, nous profitons d'un arrêt à l'abris d'une nouvelle averse pour réserver une chambre triple. Ils voyagent sans moyen de camper, projetant la fin de l'étape en fonction du logement choisi au préalable. Mais dans ce pays une chambre partagée coûte trois fois rien. Et ils n'ont pas lésiné sur le choix de l'hôtel. Pour quelques euros seulement nous avons une gigantesque chambre, un grand lit chacun, et de l'espace suffisant pour y faire entrer nos vélos et faire sécher nos affaires.
Le lendemain rebelote, ils adaptent leur programme pour nous trouver une nouvelle chambre commune le soir même, ce qui n'est pas de refus pour moi face au prix dérisoire et aux temps très capricieux. Nous traversons des champs à perte de vue, notamment de canne à sucre. Nous arpentons des routes secondaires et pour le coup très peu gênés par la circulation. C'est une belle journée de cyclisme, probablement une de mes préférées dans ce pays.
Nous terminons la journée avec la pénombre de la fin de journée. Pas tant que nous ayons énormément pédalé, mais les départs ne sont pas très matinaux. A chacun son adaptation! Les abords de Litang où nous arrivons sont très industriels. Nous longeons des échoppes d'artisans. Les effluves de bois coupé se mélangent à celle de la soudure.
Nous devons nous mettre en règle en déclarant notre présence auprès de la police locale. Il semblerait qu'il faille se faire enregistrer en tant que touriste à chaque ville. Ce sera bien la seule fois.
Après une matinée à pédaler, nous nous rassasions dans les abords de la ville de Binyang. Parfait reflet de la croissance économique et démographique chinoise. Les grues construisent ici un nouveau quartier résidentiel. Les bâtiments gigantesques pourront accueillir quelques vingt mille nouveaux habitants.
Je quitte mes compagnons de quelques jours à Silang. Leur route continue vers l'Ouest alors que je continue ma quête vers le Sud.


Je trouve un famille bien heureuse. J'avais contacté Qikun via le réseaux warmshower. Actuellement à Kunming pour ses études, c'est le plus naturellement du monde qu'il me proposa de dormir chez ses parents... qui ne parlent pas un mot d'anglais. Ils sont cependant ravi au possible de m'avoir chez eux dans cette région reculée où bien peu de touristiques étranger mettent les pieds. Nous conversons via des applications de traductions sur leur smartphone. Et finalement nous nous en sortons pas si mal, les joies de la technologies.
Le lendemain je pars pour Nanning, dernière grosse ville avant le Vietnam. Capitale de province avec ses quelques 3,5 millions d'habitants, je retrouve la cohue des grandes agglomérations. J'avais globalement le choix pour être accueilli. Mon choix s'est finalement porté sur un groupe d'étudiants éthiopiens. La Chine investi beaucoup en Afrique et en contre parti établi des programmes d'accueil pour les jeunes africains. Pour eux c'est une aubaine majeure pour leur avenir et les possibilités d'embauche de retour dans leur pays. Alors que les étudiants chinois cherchent eux à venir en Europe ou aux Etat unis.
J'avais déjà l'impression de venir d'une autre planète dans cette région de la Chine. Mais des africains... c'est encore une autre histoire. Alors qu'aux abords du campus les gens sont habitués. Il nous faudra une balade dans le parc de la ville pour me rendre compte la frénésie que leur présence peut générer. Observés, photographiés, pointés du doigt sans gène... "Comme au zoo!" me fera ironiquement remarqué une de mes hôtes.

A notre retour je dois quitter les lieux sans trop de ménagement, l'établissement étant réservé aux étudiants.

Heureusement je trouve parallèlement un nouvel hôte, qui se proposera même de jouer les interprètes pour une rencontre avec une kiné locale. Le statut de kiné n'existe pas officiellement en Chine. Cette thérapeute pratique donc globalement le massage traditionnel et incorpore facilement de l'acupuncture. Il n'existe donc pas de rééducation et réadaptation au sens propre du terme.
Puis je pars pour mes derniers jours dans l'empire du milieu. Je sors non sans souci d'orientation de Nanning. Puis trouve finalement la route qui me mènera au Vietnam.
La route est un point de passage pour les échange commerciaux avec la chine, et je dois jouer des coudes avec les camions. Enfin, je dois plus souvent me rabattre sous les coup de klaxons rageusement lancés à mon égard. Mais j'essaie de tenir ma position autant que possible. Je campe en pleine cambrousse avant d'atteindre le lendemain la ville frontalière où je passe la nuit. Le poste frontière est principalement routier, et autant dire absolument pas adapté pour les piétons et vélo qui doivent emprunter un chemin différent que celui des voitures. Je dois m'y reprendre à plusieurs fois avant de finalement trouver la bonne route. Je n'insisterai jamais assez sur les difficultés de compréhension en Chine, même dans la langue des signes. Je dois expliquer près de 5 minutes à un garde qu'il doit ouvrir la barrière routière car mon vélo chargé ne passe dans l'endroit réservé aux piétons. Le choc culturel n'est pas négligeable. Je n'ai aucun regret de l'avoir maintenu sur mon trajet. C'est un pays à faire une fois dans sa vie, qui a l'avantage de montrer plusieurs visages tant au niveau des paysages que de la culture et des gens. Je suis cependant pas mécontent de le quitter.
Au Vietnam je suis accueilli à bras ouverts. L'officier a été averti de mon arrivée par l'agence qui m'a procuré la lettre d'invitation pour mon visa de 3 mois. Tout est prêt pour mon arrivée et il a même révisé son français. Ça tombe bien j'ai étudié mon vietnamien. Nous échangeons les formules de politesse chacun dans la langue de l'autre, hilares (surtout lui parce que mon accent semble à travailler encore).
J'atteins la première ville pour me restaurer et trouver une carte sim. Il est souvent bien salutaire d'avoir un numéro local et j'en prends un à chaque fois que je m'attarde un peu dans le pays.
Je reprends la route. Le Vietnam s'annonce encore plus sonore que la chine, le klaxon est de mise, même pour une situation inextricable où seule la patience est de rigueur. Je quitte les hauts plateaux du nord par une belle descente. Déjà les rizière bordent la route et offrent un paysage magnifique. Je me fais rapidement surprendre par l'obscurité, ayant négligé que le décalage horaire allait me faire perdre une heure d’ensoleillement. La route étant bordées de cultures, il n'y a pas moyen de planter la tente. Je trouve refuge dans un restaurant routier où l'on me propose de bivouaquer sous le auvent après m'avoir offert le couvert. La proximité de la route ne me fera pratiquement pas fermer l’œil de la nuit. Je quitte mon repères aux aurores en laissant un mot de remerciement.
Je continue le long des rizières dans la circulation. Alternant entre route principale et secondaires, ces dernières ne s'avérant pas toujours une meilleure option. J'arrive a Hanoï en fin de journée. Je passe la première nuit dans une collocation d'étudiants où je ne sentirai pas bien du tout. On ne peut pas toujours bien tomber!
Heureusement Romain me propose de m’héberger dès le lendemain. Il a parcouru à vélo le pays du sud au nord et s'offre quelques jours de repos. Il loue un appartement qu'il met généreusement à disposition d'autres voyageurs. C'est ainsi que je rencontre Guada, argentine de passage, et que je retrouve Charlotte et Solène, rencontrées à plusieurs reprises en Asie centrale au début de l'été. Une petite collocation s'improvise autours de bon repas. J'en profite pour me reposer et découvrir la vie locale de la capitale du Vietnam, en attendant la venue de personnes un peu spéciales...!
